Posté le 15/01/2020
Du foot,
derrière des barreaux
Journée forte et marquante, pour le Besançon Foot, en visite ce mercredi à la maison d’arrêt de Besançon. Plongée dans cet univers carcéral, forcément à part, où les joueurs de Hervé Genet étaient des invités très attendus.
« Si on vous bat, on échange de place, si vous voulez ». Juste avant la partie matinale du tournoi amical organisé, à la Butte, ce détenu a cette phrase et ce sourire, à l’adresse de Rafael Dias et ses partenaires, qu’il s’apprête à défier, avec ses camarades. Invité et venu de bon cœur, le Besançon Foot n’est pas là pour juger. Via ses joueurs, il est, pour ces hommes arrêtés, une sorte d’identification et de repère.
Un rôle sociétal auquel tient particulièrement le club du président Frascaro, le seul de football dans la région à être partenaire de France Adot 25, l’association qui milite pour le don d’organes, initiative qui suivait la synergie avec la précieuse association Rêves, au chevet des enfants malades. Une mission d’ambassadeur de la cité, importante aussi pour la ville de Besançon, laquelle, par l’intermédiaire de Karima Rochdi, conseillère municipale déléguée au contrat de ville et à la vie associative, a supervisé cette action qu’a préparé, depuis un certain temps et à bon escient, Jaouad Amarouch, directeur sportif du club.
Entre footeux et détenus, échange et respect
Elle est appelée à durer, tant il est vrai que les liens, entre administration pénitentiaire et Besançon Foot, ont vite paru chaleureux, ce mercredi matin. Entre les murs et entourés de barbelés, la délégation bisontine a eu droit aux présentations d’une prison qui frôlait les 200% de taux d’occupation, le mois dernier, avec environ 450 personnes. Chez le très apprécié Jean-Michel Laurent, directeur depuis un peu plus de deux ans, il y a cette volonté palpable de rendre la prison la plus accueillante possible. « Des détenus, qui ont des formations de peintre ou autres, participent à la rénovation. On sent une fierté, chez eux » est-il alors expliqué.
Véronica Giscon, la directrice adjointe, prend le relais, alors que des maillots viennent d’être offerts par le Besançon Foot. Sur le petit terrain en sable de la prison, que les hommes d’ici, « en cellule 21h sur 24 » nous raconte l’un d’entre-eux, ont le droit de fréquenter deux fois (1h30) par semaine, il est question de « respect et de fair-play ». Des notions qui ne se démentiront pas, tout au long de la journée. Parce qu’ils sont distillés par de vrais pros, ces messages ont du sens. Tout comme la notion de partage, qui a plu à Boubacar Seck, le moniteur de sport pas comme les autres, pour ces gaillards. Bon et respecté, l’ancien international sénégalais et ex-professionnel du Racing Club de Strasbourg, est sûr d’une chose : « Ils parleront de cette journée pendant toute l’année ». Il y aura ces souvenirs, ce premier but des « locaux », presque dans une ambiance de stade de foot, avec les hourras des codétenus, derrière grillages ou fenêtres.
Un exutoire, une façon d’être un peu libre dans sa tête, le temps d’une journée, derrière des barreaux, conclue par un goûter en commun. Trois heures plus tôt, alors qu’Abdel Ghezali, adjoint aux sports, avait rejoint la troupe dans l’après-midi, le très humain Hervé Genet s’était isolé sur le terrain, un sifflet à la bouche. Il glissait un petit « t’as des qualités » à un détenu, touché par le compliment, venait de parler de « bonne leçon » à son groupe à l’impeccable comportement. L’entraîneur bisontin avait aussi esquissé l’expression de « seconde chance ». Des mots qui résonnent tellement plus fort, quand monde extérieur et univers carcéral se rencontrent.
Maxime Chevrier